Le socialisme et l’homme

E. Che Guevara, FM/petite collection Maspéro 19, Paris, 1968, 135p.
vendredi 2 mai 2008
par mathieu
popularité : 1%

6/10

Introduction par Fidel Castro. Lénifiante ! Dans la veine « regardez comme Che Guévara était un grand homme : la preuve, il pense que je suis le plus grand ».

Un style assez surprenant, je trouve, peut-être familier pour l’époque (mais j’en doute) caractérisé par l’emplois systématique de la 3ème personne du pluriel, « nous pensons », « nous faisons »...

Résumé :

1.Cuba : cas exceptionnel, ou avant-garde de la lutte contre l’impérialisme ?

p.20

Analyse des forces révolutionnaires propres à Cuba (paysans, citadins globalement tous mécontents et exploités, présence même de bourgeois dans leur rangs !). Malgrès ce « cas particulier » la révolution peut et doit être exportée. C’est « une nécessité interne » commune aux peuples d’Amérique du Sud.

2.Qu’est-ce qu’un jeune communiste ?

p.35

Ce texte de 1965 est le plus intéressant du recueil. Il semble intervenir à un moment où les cadres de l’Union des Jeunes Communistes (sève de la Révolution Cubaine et son avenir) montre les limites de son engagement. Il s’agit du discourt anniversaire de l’Union, dans lequel Che Guevara fustige une tendance bien connue dans l’univers syndical : la désertion de poste. Visiblement, la tendance à l’absentéisme au travail des jeunes communistes cubain est alors inquiétante et ne correspond pas à l’idéal ascétique et prêchant par l’exemple du Che.
Cela l’amène à définir ce que doit être le jeune communiste :
- Fier de ce qu’il est.

- Être sensible à l’injustice, toujours se rebeller, « déclarer la guerre à tous les formalismes » (!).

- Avant gardiste (le meilleur en tout : travail, étude, écoute).
- Internationaliste.

- Avoir l’esprit de sacrifice.

P46 « Autrement dit, le devoir de tout jeune communiste est d’être essentiellement humain, tellement humain qu’il se rapproche du meilleur de l’humain ; de purifier le meilleur de l’homme par le travail, l’étude, l’exercice de la solidarité permanente avec le peuple et avec tous les peuples du monde ; de développer sa sensibilité au point de ressentir de l’angoisse quand on assassine un homme quelque part dans le monde et d’être exalté quand se lève quelque part un nouveau drapeau de la liberté ».
La conclusion de Che Guevara est édifiante : je vous laisse car je vais rejoindre mon usine où on a décidé d’exploser les quotas de production...

Brrrr, ça fait froid dans le dos cette idéologie de l’homme parfait ! Sinon, il faut reconnaître la beauté de son universalisme (mondialiste...). On sent également une certaine teinte naïve à la Saint François d’Assise, l’homme est bon et mon exemple messianique ouvrira la voie aux masses innombrables de mes semblables. Mais si on se souvient de Saint François, on se souvient de son testament : « ils s’enrichissent en mon nom, les salauds ! ». On peut penser également à l’exemplarité de la vie de Gandi, en version révolutionnaire et violente.

3. La guerre de guérilla : une méthode. p.49

Un texte de 1968.
Pour étendre la révolution il faut éviter les villes (anesthésiées par l’espoir de profiter des miettes du capitalisme) et s’appuyer sur les campagnes aux masses paysannes exploitées.
Guévara reprend in extenso de grands pans de « la seconde déclaration de La Havanne » au point qu’on peut s’interroger sur l’intérêt de produire un tel texte (Monsieur Fidel Castro, une idée ?) et le thème de l’ennemie déclaré : le Yankee !

4. Le discours d’Alger.

p.70 1965. Les pays socialistes doivent se serrer les coudes (échanges économiques préférentiels, dons et aides...) et « liquider leur complicité avec les pays exploiteurs de l’Ouest »... La guerre froide vue du côté cubain.
p.81 « les armes ne sauraient être des marchandises (...) Elles doivent être livrées absolument gratuitement... ».

5. Le socialisme et l’homme à Cuba.

p.86 Prééminence de l’Etat : Fidel Castro (réécriture posthume ou original du Che ?) est l’homme providentiel. Dialectique entre ce leader et les masses : « changer l’homme en même temps que changer la base économique ». Péché originel des intellectuels : ils n’étaient pas révolutionnaires à la première heure alors maintenant ils font semblant.

Fin

(p.115) Lettre d’adieu du Che a ses parents (genre testament).

Créer 1, 2... de nombreux vietnam, voilà le mot d’ordre.

« On nous a acculés à cette lutte... » p.129
1967, le nouveau terrain révolutionnaire doit être l’Afrique...

Quand on lit ça, on se dit tout de même que, pour certains, la guerre froide n’était pas si froide que ça...