Généalogie
« Si vaine que soit la constitution d’un arbre généalogique, où pend toujours une quantité considérable de bois mort (cet arbre poussant dans le passé, on devrait logiquement dire une racine généalogique), si vaine que soit la recherche et le dosage plus où moins truqué d’une ascendance, je je dédaigne pas ce petit jeu. L’origine de mes vingt-quatre paires de chromosomes m’intéresse. Mais surtout le dépouillement d’un registre présente en lui-même un attrait analogue à celui du miracle de Lazare. L’acte de naissance de ces morts du XVIIème siècle, qui n’ont même plus de tombe, les restitue partiellement à la vie. (…) La grande histoire peut mépriser ces humbles, en elle anonymes comme en nous sont anonymes les millions de globules de notre sang. Mais ni elle, ni la petite histoire, ni même le roman, quelles que soient les précisions et la couleur de son récit, ne peuvent donner ce caractère d’authenticité, ce parfum de fleur desséchée qui a pourtant fleuri. »
Hervé Bazin, Vipère au poing, Livre de Poche 1948, p. 130